mardi 19 mars 2019

Est-ce bien toui à la ferme de Godonvillier ?


Un joli vol sur la campagne pour marquer le coup d'envoi de ma saison de vol libre de cette année, ça change du coup d'arrêt de celle de l'année dernière. Pourtant j'ai bien failli passer à côté, l'ensemble des prévis erronées du matin s'étant dégradées en indiquant des conditions a priori médiocres concernant le plafond exploitable et la présence des cumulus.

Mais les ciels de traîne étant souvent les meilleurs le lendemain ou le surlendemain du passage des perturbations, je me suis méfié, et l'enthousiasme de Michel a achevé de me convaincre de saisir cette journée. Je lui fixe toutefois un RdV "prêt à décoller" vers 13 heures au lieu de midi comme je l'envisageais encore la veille.

En route vers Egry, les premiers cumulus apparaissent dès le milieu de la matinée. Il y a de l'humidité dans l'air, et aussi dans le sol, la terre est grasse. J'espère que la météo ne va pas nous servir des cumulus "hongrois" !

A 13 heures, le ciel est beau, bien pavé en jolis nuages, on aperçoit même des petits alignements.


Je commence à regretter de n'être pas arrivé plus tôt.

Michel, qui est allé tâter l'atmosphère en ulm, me confirme que là-haut, il fait froid, 0°C au plafond à 1200 m, et que j'ai tout intérêt à partir avec le maximum d'épaisseurs sur l'épiderme.

Après quelques aléas du début de saison dans le montage de l'aile plus une rupture du fusible, je décolle enfin vers 13h45... Le vent est de secteur nord, calme au sol, et 10 à 15 km/h en altitude. Largage vers 660 m au-dessus du sol. Quand on passe en remorqué sous un gros nuage en voyant le vario qui s'envole à plus de 4 m/s, c'est le signe qu'il faut tout de suite enrouler la pompe.

Bingo : 2 m/s intégrés et réguliers jusqu'à la base du nuage, tranquillement, sans effort. C'est royal ! Bien que le plafond ne soit pas exceptionnel, les conditions sont suffisamment bonnes pour me lancer sur la campagne, en essayant quand même de rentrer au terrain avant la fin de la journée.

Compte tenu du sens du vent, la balade commence en direction du sud. L'objectif du jour sera de tenter un petit triangle, FAI si possible.

La redécouverte aérienne de la région de la forêt d'Orléans est toujours remplie de contemplation, voire de béatitude, tellement le paysage est beau. Après Bellegarde, j'évite de m'aventurer jusqu'à Lorris. Le nombre de points bas que j'ai faits dans ce secteur me rappellent à une certaine prudence.

Après avoir refait le plein d'altitude au niveau de Châtenoy, il apparaît que la route est toute tracée vers le nord-ouest, alors allons-y gaiement. Le plafond s'élève jusque vers 1500 m, c'est génial.

Le vent de face n'est pas trop fort, mon cheminement se poursuit sans encombre (c'est quand même bien de voler en rigide, j'imagine la galère des parapentes dans la même situation). Juste le froid qui se fait plus mordant durant les transitions malgré les protections. Dans les barbules des nuages, la température lue sur mon vario-GPS vaut désespérément zéro. Alors régulièrement, une descente dans les basses couches, avant de retrouver une pompe, est plutôt bienvenue pour me réchauffer un peu.

Au nord-ouest de Pithiviers, où je me suis pris d'ailleurs un cisaillement à manquer de me faire lâcher la barre de contrôle, les conditions sont toujours très bonnes, et je décide de pousser jusque vers Méréville.

Un détail important m'a toutefois complètement échappé.
Emporté dans l'euphorie de mon vol, j'ai oublié qu'au mois de mars, on est encore à l'heure d'hiver. Les journées où la convection dure jusqu'à 20h30 ne sont pas de saison, et en plus elles sont à l'heure d'été. J'avais simplement pensé qu'en mars, on peut bien enlever deux heures pour estimer la fin de la convection par rapport à celle en été, et qu'en atteignant le secteur de la source de la Juine vers 16h30, il me resterait alors assez de marge pour retourner tranquillement à Egry. Que nenni ! Dès 17 heures, heure d'hiver, la convection s'effondre.

Au lieu de batifoler à trente bornes du terrain, j'aurais été plus avisé de me préoccuper de l'heure limite pour prendre le cap du retour. Et aussi de décoller à midi, ce qui fait déjà 13 heures en heure d'été. L'intérêt de la comparaison par rapport à l'heure d'été est de se référer à des habitudes en vol libre où l'évolution de la convection est associée à une certaine manière de compter le temps.

Pour l'heure, les pompes disparaissent ou deviennent très molles, impossible de remonter. Par chance, le vent, qui s'est orienté au nord-ouest, me pousse dans la bonne direction. Les thermiques générés par les constructions humaines isolées dans la plaine, corps de ferme ou agglomération, me permettent juste de me maintenir à 300 ou 400 mètres au-dessus du sol.

A ce petit jeu là, je risque fort de me retrouver dans une situation délicate si ma route traverse une zone non convective et non posable. Donc mieux vaut utiliser le peu d'altitude qu'il me reste pour trouver un lieu d'atterrissage sain, en l'occurrence un champ pas trop boueux. La chevauchée légère et fougueuse de quelques bambis a attiré mon attention vers une bande d'herbe assez bien orientée par rapport au vent et assez large pour me poser sans problème et replier mon aile sans salissures.L'endroit est parfait. Il est environ 17h35, toujours à l'heure d'hiver, et même au sol, il ne fait pas chaud.




Une visite de la fermière et de ses parents, qui sont arrivés dans un grand 4x4, m'apprend que nous nous trouvons dans la ferme de Godonvillier, non loin d'Estouy au nord-est de Pithiviers. Comme ils reçoivent de la famille, la femme revient sur sa proposition de me ramener à Egry. Bon, alors ce sera le stop. En trois voitures et 7 km de marche, je suis rendu à mon véhicule. La nuit tombée, le stop n'est pas aisé. Il faut se placer sous un lampadaire à côté d'un feu en attendant qu'une voiture s'arrête pour pourvoir parler au conducteur, en lui faisant au préalable un signe de la main grande ouverte qui veut dire "paix". Au bout du compte, j'ai pu arriver à temps au kiosque à pizza au sud de Pithiviers pour me restaurer simplement et avec grand plaisir, et aussi pour saluer la dame bien sympathique qui gère la boutique, et qui mérite bien une petite visite de temps en temps après une belle journée de vol libre.

Quand j'ai récupéré mon aile, la rosée du soir sur la housse s'était transformée en cristaux de glace...

Mon vol a duré 3h51, et la distance aérienne parcourue vaut 87 km (déco - Gaubertin - Châtenoy - Autruy sur Juine - ferme de Godonvillier, à 15 km d'Egry à vol d'oiseau). Cette belle journée au grand air s'est achevée le lendemain matin avec la réparation d'une grosse fuite d'essence près du moteur de mon auto...



Frédéric

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