mardi 4 août 2020

Triangle aux barbules

Mardi 4 août 2020. Afin de dépasser le désenchantement que j’ai expérimenté l’avant-veille à Egry (le vent du NO soutenu sous un ciel bleu régulièrement voilé par des cirrus, nous avait retranché dans nos réserves pour décoller en remorqué sans assistance, tandis que peu avant 16 heures, le ciel au-dessus d’Egry et vers le sud-ouest s’était complètement dégagé en cirrus, ce qui avait permis la formation de centaines de cumulus hauts perchés et généreux ; c’était magnifique, et même à faire rêver, surtout en étant au sol ; le ciel est resté plus clairsemé vers le nord-ouest, et toujours chargé en cirrus + cumulus vers le sud-est), j’ai décidé de retourner sur les lieux de la frustration, avec cette fois-ci de meilleures augures quant aux conditions aérologiques. Michel a accepté bien volontiers de retourner au terrain pour me remorquer.

Les prévis indiquaient quelques cumulus entre midi et 14h, puis un ciel tout bleu avec des plafonds jusqu’à 2000 m et un vent faible du NNO. Pas de quoi rameuter les troupes du sud-ouest, qui guettaient une belle journée dans le Loiret pour tenter de réaliser un triangle, au départ de Saint Benoît ou d’Egry. Non, j’ai juste pensé que la journée serait une nouvelle occasion de travailler le vol sur la campagne en thermiques purs, avec quand même plus de plafond que lors du dernier vol du 29 juillet.

Mais la masse d’air s’était bien rafraîchie, et le ciel du Gâtinais, ainsi que plus au sud vers Loire, s’est généreusement pavé de beaux nuages toute la journée. Ce fut splendide, et inattendu ! Décollage vers midi et demi (une demi-heure de perdue pour cause de discussion trop longue avec Michel), avec pour objectif de la journée de réaliser à nouveau ce triangle dont je connais le cheminement par cœur (Lorris au sud, Angerville au nord-ouest, Nemours au nord-est), mais en essayant de l’agrandir si les conditions le permettent.

La première pompe m’a emmené direct à plus de 1400 m sol, mais encore en dessous de la base du nuage que je n’ai pu atteindre. C’était prometteur. Alors j’ai enquillé sans hésiter vers le sud, ou plutôt vers le SSE où les cumulus étaient plus mûrs. La base des nuages se situait vers 1700 m, extra !

Premier point de virage à 3,5 km au sud de Lorris au bout d’une heure de vol, c’était plutôt encourageant. Mais comme d’habitude dans ce secteur, la remontée en altitude a été un peu laborieuse et source d’une perte de temps. Mieux valait ne pas insister. J’étais encore assez haut pour me tirer vers le nord-ouest, où de beaux nuages me tendaient les bras. Et bien m’en avait pris, car une fois trouvé le noyau de la pompe suivante, je fus propulsé dans les barbules qui évoluaient vers 1900 m sol.

C’est toujours magique, cette sensation de voir peu à peu l’horizon se fondre dans la base des nuages, et de se retrouver aspiré dans les barbules. Revers de la médaille, il faut rester vigilant, car on peut ne pas être seul : un planeur allemand qui venait justement d’en face et qui m’avait vu en premier a plongé pour me passer en dessous… On s’est salué d’un signe de la main.

En arrivant sous un cumulus en pleine maturité, il ne fallait pas se mettre en spirale dès que le vario devenait positif. Il fallait attendre, en louvoyant un peu, et soudain, une secousse vers le haut, traduite par l’aiguille du vario qui s’envolait à 3 m/s ou 4 m/s, indiquait le bon moment pour se centrer dans le noyau du thermique.

Second point de virage, entre la N20 et la A10, au-delà d’Angerville, atteint au bout de trois heures de vol environ. Curieusement, le ciel est resté bleu vers l’ouest au-dessus de la Beauce. La balade aérienne s’est poursuivie tranquillement vers l’est, en prenant soin toutefois de ne pas tamponner dans la TMA Paris 7, dont le plancher est à 6500 ft QNH (1981,2 m QNH, c’est-à-dire à peu près 1870 m par rapport au terrain). Sermaise, Malesherbes, la forêt de Fontainebleau, survol de l’église de Larchant et de l’étonnant labyrinthe aquatique dans la végétation. Des planeurs, probablement pilotés par des jeunes fraîchement lâchés, faisaient la course sous la forme d’allers-retours entre Malesherbes et Nemours, sans trop prêter attention d’ailleurs à ce deltiste qui « s’invitait » dans leur espace de jeu.

La fin de l’après-midi a commencé à se faire sentir dans le sens où je devais allonger les transitions entre deux thermiques, ce qui signifiait une perte d’altitude plus importante avant de retrouver un ascenseur, bien que mon altitude ne fût jamais descendue en dessous de 1000 m sol. D’ailleurs, aucun point bas n’est à signaler, ce qui illustre les conditions finalement excellentes de la journée.

Franchissement du Loing par le nord de Nemours peu après 17 heures. M’aventurer plus à l’est n’était pas très rassurant car les nuages au-dessus de la Seine-et-Marne avaient disparu, à l’exception d’un ou deux clairsemés dans le ciel. Même la grande forêt au sud-est de la ville ne donnait rien. Cela ne voulait pas dire qu’il n’y avait pas de thermique, mais en l’absence de matérialisation alors que d’autres cumulus trônaient isolés dans le ciel, je m’autorisais à avoir des doutes.

Qu’à cela ne tienne, j’avais envie d’essayer d’atteindre au moins le secteur de l’aérodrome de Moret-Episy. Les fesses un peu serrées, car si je ne trouvais rien pour remonter, devoir traverser à pied l’agglomération de Nemours et le cours d’eau avant de pouvoir espérer être pris en stop vers Egry aurait été passablement galère. Après une remontée insignifiante dans un thermique mou de restitution, des installations agricoles jouxtant une forêt qui suivait un petit cours d’eau, et plus particulièrement un rectangle tout blanc placé entre un bâtiment et la forêt, ont attiré mon attention.

Une fois arrivé au-dessus de cet endroit singulier, bingo, un puissant thermique, variant entre 2 m/s et 4 m/s, me propulse jusqu’à la hauteur maximale autorisée dans le coin (en dessous de la TMA Paris 7), le nuage qui venait de se former étant bien plus haut. La puissance de ce thermique était étonnante, tout comme le moment où cela s’est produit. Je ne me suis pas privé de remercier Dame Nature pour avoir si admirablement synchronisé les évènements.

Après une courte incursion vers le nord-est, qui m’a permis de constater que de nombreux planeurs de l’aérodrome avaient déjà atterri, je me suis dit qu’il était plus sage de faire demi-tour pour profiter à nouveau de ce thermique si puissant qui me permettrait de traverser Nemours vers le sud-ouest tant qu’il en était encore temps. Le thermique s’est amplifié jusqu’à 5,4 m/s intégré, incroyable. Ce fut la meilleure pompe de la journée. A cette heure tardive, c’était bien singulier, cela a dû « chauffer » tout en bas !

Pour rentrer ensuite vers le terrain, ce fut très simple car il suffisait de suivre la route vers le sud-ouest. Mais les thermiques s’étaient malheureusement évanouis, à tel point que j’envisageais d’atterrir entre les éoliennes et Beaumont. Et un puis un ultime thermique venu je ne sais d’où parmi les champs, m’a permis de regagner à bonne allure l’altitude confortable de 1300 m sol. Le comble est qu’après, cela ne descendait plus, ou faiblement… Surprise en survolant le hangar, Michel était encore là, il nettoyait l’aile de son ulm avant d’aller savourer, après mon atterrissage vers 18h30, un vol calme du soir au coucher de soleil…

Heureux d’avoir pu profiter de cette superbe journée (en l’air et non au sol), ravi d’avoir pu élargir et boucler mon circuit, et tout fier de montrer à Michel la trace de mon vol sur mon GPS Compeo ! A nouveau, un grand merci à lui de s’être déplacé pour me remorquer ! Masqués par nos couleurs du soleil sur nos visages, nous avons joyeusement terminé la journée par notre traditionnelle pizza bière au kiosque à Pithiviers.

Mon vol a duré six heures et j’ai parcouru 190 km en triangle FAI : Egry – Lorris – Mérouville (7,5 km à l’ouest d’Angerville – Rebours (2,5 km au sud de l’aérodrome de Moret-Episy) – Egry. La trace est disponible à l’adresse : https://delta.ffvl.fr/cfd/liste/vol/20290525  (la durée du parcours en lui-même a été réduite à 5h28, ce qui conduit à une vitesse moyenne de 34,8 km/h).

Encore une journée formidable de vol libre, qui laisse des souvenirs forts en attendant la prochaine occasion !

Frédéric

 

 



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